Dossiers législatifs
LOI n° 2014-372 du 28 mars 2014 relative à la géolocalisation
Exposé des motifs
Projet de loi relatif à la géolocalisation
JUSX1329164L
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La géolocalisation est un procédé permettant, à tout moment, de localiser un individu ou un bien. Elle est donc fréquemment utilisée par les services de police, de gendarmerie et des douanes dans les enquêtes, afin de venir en soutien d'une surveillance physique d'une personne ou d'un bien, ou pour établir, en temps réel, l'itinéraire et les fréquentations d'une personne.
En pratique, il existe deux techniques de géolocalisation en temps réel lors d'une enquête :
- le suivi dynamique, en temps réel, d'un terminal de télécommunication permet, par la mise en œuvre d'une procédure spécifique, de localiser notamment un téléphone portable ;
- l'utilisation d'un dispositif dédié (une balise), installé sur un objet ou un moyen de transport, permet de déterminer, en temps réel, la position d'un objet (véhicule, container) ou d'un individu.
Par deux arrêts en date du 22 octobre 2013, la Cour de cassation a considéré que le recours à la géolocalisation en temps réel lors d'une procédure judiciaire constitue une ingérence dans la vie privée, qui doit être exécutée sous le contrôle d'un juge.
La Cour de cassation valide cette mesure lorsqu'elle est exécutée sous le contrôle d'un juge d'instruction dans le cadre d'une information judiciaire, mais la censure, au visa de l'article 8 de la Convention européenne des droits de l'Homme (CEDH) qui garantit le droit au respect de la vie privée, dans le cadre d'une enquête dirigée par le procureur de la République.
L'article 1er du présent projet de loi complète le code de procédure pénale afin d'encadrer les conditions dans lesquelles il pourra être procédé aux opérations de géolocalisation en temps réel, en insérant à cette fin dans le titre IV du livre Ier de ce code un chapitre V comportant les articles 230-32 à 230-38.
Le nouvel article 230-32 dispose que la géolocalisation en temps réel d'une personne ou d'un bien est possible dans le cadre d'une enquête relative à une infraction punie d'une peine d'emprisonnement supérieure ou égale à trois ans, d'une enquête en recherche des causes de la mort, de disparition ou des personnes en fuite.
Aux termes de l'article 230-33, le procureur de la République peut autoriser dans les enquêtes qu'il dirige les opérations de géolocalisation en temps réel pour une durée maximum de quinze jours. A l'issue de ce délai, le juge des libertés et de la détention est compétent pour autoriser, à la requête du procureur de la République, la poursuite des opérations de géolocalisation pour une durée d'un mois renouvelable dans les mêmes conditions de forme et de durée. Lors d'une information judiciaire, les opérations prévues par le présent projet de loi sont autorisées par le juge d'instruction pour une durée de quatre mois renouvelable. Comme le prévoit l'article 100-1 du code de procédure pénale en matière d'écoutes téléphoniques, il est précisé que la décision de ces magistrats est écrite et n'est susceptible d'aucun recours.
L'article 230-34 encadre la possibilité de pénétrer dans un véhicule, un parking ou tout lieu privé, y compris un domicile, afin de procéder à l'installation d'un dispositif de géolocalisation.
L'introduction dans un lieu privé destiné ou utilisé à l'entrepôt de véhicules, fonds, valeurs, marchandises ou matériel ou dans un véhicule situé sur la voie publique ou dans un tel lieu est subordonnée à l'autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction.
L'introduction dans un autre lieu privé n'est possible que lorsque l'enquête ou l'instruction est relative à une infraction punie de cinq ans. S'il s'agit d'un lieu d'habitation, l'autorisation du juge des libertés et de la détention est requise, en enquête, à toutes heures, et, en instruction, lorsque l'introduction a lieu de nuit.
L'article 230-35 prévoit qu'en cas d'urgence résultant d'un risque imminent de dépérissement des preuves ou d'atteinte grave aux personnes ou aux biens, l'autorisation de procéder à une mesure de géolocalisation en temps réel peut être donnée par tout moyen. Une décision écrite de géolocalisation doit ensuite intervenir dans un délai de quarante-huit heures.
L'article 230-36 élargit aux agents qualifiés des services, unités ou organismes placés sous l'autorité du ministère de l'intérieur, la possibilité de placer un dispositif de géolocalisation. L'article renvoie à un décret pour la désignation des services compétents.
Aux termes de l'article 230-37, les opérations de géolocalisation se déroulent sous l'autorité du magistrat qui les a autorisées. Elles peuvent révéler des infractions différentes de celles visées dans la décision du magistrat sans que cela constitue une cause de nullité des procédures incidentes.
L'article 230-38 précise que les dispositions du présent texte n'ont pas vocation à s'appliquer quand la géolocalisation est réalisée à partir du téléphone portable de la victime. En effet, dans cette hypothèse, la mesure n'a pas pour objet de rassembler des preuves à l'encontre de la victime mais elle intervient dans son intérêt.
L'article 2 vise à doter les agents des douanes, à l'instar des officiers de police judiciaire et selon les mêmes modalités procédurales, de la possibilité, pour les besoins de l'enquête douanière, de mettre en place des systèmes de géolocalisation en temps réel, sur autorisation judiciaire.
Ce dispositif serait limité aux infractions douanières les plus graves, à savoir des délits douaniers punis d'une peine d'emprisonnement égale ou supérieure à trois ans (contrebande de marchandises prohibées telles que les stupéfiants, les armes et matériels de guerre, les biens à double usage civil et militaire, les déchets, etc.).
Le suivi des marchandises en temps réel peut être un élément déterminant dans la conduite d'une enquête en permettant notamment l'identification de lieux de stockage et celle de l'ensemble des auteurs de la fraude ou y participant, notamment en vue de la mise en œuvre d'une visite domiciliaire.
La possibilité de recourir pour des services spécialisés de la douane aux systèmes de géolocalisation en temps réel est donc nécessaire pour renforcer le dispositif douanier de lutte contre la fraude douanière qui utilise différents vecteurs d'acheminement et qui est par nature fugace.
Par ailleurs, un tel dispositif sera complémentaire à la mise en œuvre de pouvoirs d'investigations similaires à ceux prévus par le code de procédure pénale (retenue douanière, opération de surveillance, infiltration, visite domiciliaire, etc.).