Rapport au Président de la République relatif à l'ordonnance n° 96-50 du 24 janvier 1996 relative au remboursement de la dette sociale

Version initiale

  • Rapport au Président de la République

    Monsieur le Président,
    Depuis le début des années 1990, le régime général de sécurité sociale est entré dans une spirale d'endettement croissant.
    Malgré les mesures prises depuis 1993 pour redresser les comptes de la sécurité sociale, le déficit du régime général s'est élevé à 54,8 milliards de francs en 1994. Il devrait atteindre, d'après les prévisions de la commission des comptes de la sécurité sociale, 64,4 milliards de francs en 1995.
    Le poids des charges d'intérêt qui pèsent sur le régime atteindrait 8,2 milliards de francs en 1996. C'est pourquoi, parallèlement à la mise en oeuvre des mesures structurelles et des mesures immédiates de rééquilibrage du régime général proposées par le Gouvernement, la sauvegarde de notre protection sociale rend indispensable d'apurer les déficits accumulés en 1994 et 1995, soit près de 120 milliards de francs.
    De plus, et malgré l'effort réalisé en 1996, le régime ne pourra être rééquilibré en une année. C'est pourquoi le Gouvernement propose d'apurer simultanément le déficit prévisionnel du régime général pour 1996, dans la limite de 17 milliards de francs.
    Le chapitre Ier de la présente ordonnance institue ainsi une Caisse d'amortissement de la dette sociale (art. 1er à 13).
    L'article 1er crée cette caisse à compter du 1er janvier 1996 et pour une durée de treize ans et un mois. Les contributions pour le remboursement de la dette sociale instituées au chapitre II, qui constituent la ressource principale de la caisse, seront en effet perçues au titre de la période comprise entre le 1er février 1996 et le 31 janvier 2009.
    L'article 2 précise les missions de la caisse, qui est chargée :
    - d'assurer la gestion et l'amortissement du capital et des intérêts de la dette de la sécurité sociale ;
    - d'effectuer les versements nécessaires à l'apurement des déficits de la Caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles (CANAM) ;
    - de verser annuellement à l'Etat une somme de 12,5 milliards de francs,
    compensant la suppression d'un versement d'un montant équivalent antérieurement à la charge du Fonds de solidarité vieillesse (FSV).
    Cet établissement sera en effet désormais consacré à la seule prise en charge des prestations non contributives de solidarité aux personnes âgées.
    L'article 3 définit la composition du conseil d'administration de la caisse d'amortissement et prévoit que celui-ci est assisté d'un comité de surveillance, qui comprend notamment des membres du Parlement et des représentants des caisses nationales.
    L'article 4 précise les modalités de la prise en charge par la caisse de la dette du régime général et de la CANAM, ainsi que du versement à l'Etat.
    Ainsi la caisse :
    - reprend le prêt de 137 milliards de francs consenti à l'ACOSS en vue de couvrir le déficit comptable cumulé pour 1994 et 1995 et le déficit prévisionnel pour 1996 du régime général de la sécurité sociale ;
    - verse, dans la limite de 3 milliards de francs, une somme à la Caisse nationale d'assurance maladie et maternité des travailleurs non salariés des professions non agricoles pour l'apurement du déficit de 1995 et du déficit prévisionnel pour 1996 de cette caisse ;
    - assure le versement de 12,5 milliards de francs à l'Etat pendant treize ans.
    L'article 5 précise que la caisse est habilitée à contracter des emprunts,
    après approbation du ministre chargé de l'économie et des finances.
    Les recettes affectées à la caisse sont définies à l'article 6 ; il s'agit : - du produit des contributions pour le remboursement de la dette sociale ;
    - des remboursements de créances sur des organismes étrangers de sécurité sociale découlant de règlements communautaires et des accords bilatéraux de sécurité sociale, dans des conditions fixées par décret.
    L'article 7 prévoit que le service de la dette contractée par la caisse revêt un caractère prioritaire par rapport aux autres dépenses relevant de ses missions.
    L'article 8 précise que les frais d'assiette et de recouvrement des contributions de remboursement de la dette sociale sont à la charge de la Caisse d'amortissement de la dette sociale.
    L'article 9 dispose que les caisses nationales du régime général et l'ACOSS vendront, dans un délai de quatre ans, leur patrimoine privé locatif à l'exclusion du patrimoine à usage administratif. Le produit de ces cessions sera affecté à la Caisse d'amortissement de la dette sociale.
    L'article 10 a pour objet de mettre à l'équilibre les reports à nouveau négatifs des fonds nationaux gérés par la CNAMTS, la CNAF et la CNAVTS, au prorata du report à nouveau négatif de chacune des caisses nationales du régime général arrêté au 31 décembre 1995.
    L'article 11 prévoit que les opérations de la Caisse d'amortissement de la dette sociale font l'objet d'un rapport présenté chaque année au Parlement.
    L'article 12 clarifie les missions du fonds de solidarité vieillesse, qui sera désormais exclusivement chargé du financement des prestations relevant de la solidarité nationale.
    L'article 13 prévoit que les modalités d'application du chapitre Ier feront l'objet d'un décret en Conseil d'Etat.
    Le chapitre II est relatif aux contributions exceptionnelles pour le remboursement de la dette sociale (art. 14 à 19).
    L'article 14 crée une contribution sur l'ensemble des revenus d'activité et de remplacement soumis à la contribution sociale généralisée (CSG). Y sont également assujettis :
    - en ce qui concerne les revenus d'activité, les contributions patronales aux régimes de prévoyance et de retraite supplémentaire, les indemnités versées lors de la modification ou de la rupture du contrat de travail et les allocations parentales complémentaires ;
    - parmi les revenus de remplacement, les allocations contributives de chômage, de retraite ou d'invalidité des contribuables exonérés d'impôt sur le revenu, les indemnités journalières de maladie, de maternité et d'accidents du travail et les allocations de logement.
    Les prestations familiales, dont la base de calcul n'est pas revalorisée en 1996, ne sont assujetties qu'à compter du 1er janvier 1997. Sont exonérées les indemnités de licenciement n'excédant pas le montant légal ou conventionnel, les allocations de veuvage, les pensions militaires d'invalidité et retraites du combattant, les rentes d'accidents du travail,
    ainsi que certaines prestations familiales (allocation de parent isolé,
    allocation d'éducation spéciale).
    L'article 15 soumet à une contribution les revenus du patrimoine assujettis à la CSG, en écartant l'abattement de 8 000 francs (ou 16 000 francs pour un couple) applicable en matière d'impôt sur le revenu et en retenant les revenus du patrimoine des contribuables non imposables. Les revenus d'activité et de remplacement de source étrangère - principalement les salaires des travailleurs frontaliers - sont également assujettis à la contribution, qui sera recouvrée en même temps que l'impôt sur le revenu.
    S'agissant des produits de placement, outre ceux déjà soumis à la CSG,
    l'article 16 assujettit à une contribution les revenus de l'épargne exonérés d'impôt sur le revenu à l'exception du livret A et des livrets assimilés. Il s'agit principalement des revenus des comptes et plans d'épargne logement,
    des contrats d'assurance vie, des plans d'épargne populaire (PEP), des plans d'épargne en actions (PEA), de la participation et des plans d'épargne d'entreprise, des fonds communs de placement à risque et des sociétés de capital risque.
    Il est également institué une contribution sur les ventes de métaux ou objets précieux (art. 17).
    L'article 18 institue des contributions sur la part redistribuée aux gagnants des sommes engagées sur les jeux exploités par La Française des jeux et sur les paris hippiques, ainsi que sur un multiple des recettes brutes des jeux des casinos, représentatif des gains des joueurs.
    L'article 19 fixe le taux des contributions à 0,5 p. 100.
    Enfin, l'article 20 renvoie à un décret la détermination des conditions d'application du chapitre II.
    Tel est l'objet de la présente ordonnance que nous avons l'honneur de soumettre à votre approbation.
    Veuillez agréer, Monsieur le Président, l'assurance de notre profond respect.
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