Décision du 9 août 2022 consécutive à la concertation préalable portant sur un deuxième projet éolien en mer en zone « Centre Manche » et son raccordement

NOR : ENER2223444S
ELI : https://www.legifrance.gouv.fr/eli/decision/2022/8/9/ENER2223444S/jo/texte
JORF n°0186 du 12 août 2022
Texte n° 22

Version initiale

La ministre de la transition énergétique,
Vu le code de l'environnement, notamment ses articles L. 121-1 à L. 121-16-2, R. 121-1 à R. 121-8, R. 121-12 à R. 121-16 et R. 121-19 à R. 121-24 ;
Vu le code de l'énergie, notamment ses articles L. 311-10 et suivants et R. 311-25-1 à R. 311-25-15 ;
Vu la loi n° 2015-992 du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte ;
Vu le décret n° 2020-456 du 21 avril 2020 relatif à la programmation pluriannuelle de l'énergie, notamment son article 3 ;
Vu la décision du 4 décembre 2020 consécutive au débat public portant sur un projet éolien en mer au large de la Normandie et son raccordement ;
Vu la circulaire du 9 septembre 2002 relative au développement des réseaux publics de transport et de distribution de l'électricité ;
Vu la décision n° 2021/122/EOLIEN CENTRE MANCHE/1 du 6 octobre 2021 de la Commission nationale du débat public (CNDP) d'organiser une concertation préalable portant sur un deuxième projet éolien en mer en zone " Centre Manche " et son raccordement sous l'égide de garants ;
Vu le rapport du ministère de la transition écologique consécutif au débat public portant sur un projet éolien en mer au large de la Normandie et son raccordement publié le 19 janvier 2021 ;
Vu le bilan de la concertation du 16 juin 2022 établi par les trois garants de la concertation ;
Vu les résultats de la concertation, dite Fontaine, relative au raccordement d'une capacité de 1 250 MW d'un premier parc en zone " Centre-Manche " d'une puissance maximale de 1 050 MW validant ainsi la possibilité d'évacuer entre 200 MW et 250 MW d'un second projet en Centre-Manche et de ce fait rendant mutualisable une partie des raccordements électriques ;
Considérant, sur le déroulé et le contenu de la concertation préalable, que :
- ce processus a permis l'organisation de 30 événements ayant réuni 1 285 participants, que 8 083 visites ont eu lieu sur le site internet sur lequel 255 avis ou questions ont été publiés, et que des contributions formelles ont été recueillies via 10 cahiers d'acteurs ;
- le bilan de la concertation souligne que le droit à l'information du public a été respecté au travers d'une information claire, transparente et complète ;
- le bilan de la concertation souligne que le dispositif de participation a été important et adapté, malgré la faible participation du public aux événements pléniers, mais relativement plus importante aux événements de terrain ;
Considérant, sur le rôle de l'éolien en mer dans la transition énergétique française, que :
- l'article L. 100-4 du code de l'énergie fixe un objectif d'au moins 40 % de la production d'électricité d'origine renouvelable d'ici 2030 ;
- la Stratégie nationale bas carbone et la Programmation pluriannuelle de l'énergie, exposant la stratégie énergétique française, sont toutes les deux élaborées avec la participation du public ; ces feuilles de route soulignent le besoin de développer les énergies renouvelables afin de réduire les émissions de gaz à effet de serre et de diversifier le bouquet électrique ;
- le débat public sur la Programmation pluriannuelle de l'énergie, organisé en 2018 par la Commission nationale du débat public, a mis en lumière un avis du public en faveur de l'accélération du développement de l'éolien en mer, les 400 citoyens tirés au sort pour le G400 ayant notamment voté le 9 juin 2018 à 67 % pour " l'accélération des efforts à engager pour les éoliennes en mer " ;
- l'étude " Futurs énergétiques 2050 " de RTE, publiée en octobre 2021, et l'étude " Transitions 2050 " de l'ADEME, publiée en novembre 2021, mettent en évidence que l'atteinte de la neutralité carbone nécessite un développement important de toutes les sources de production d'électricité décarbonées, notamment de l'éolien en mer, et ce même dans un scénario de développement volontaire du nucléaire ;
- le bilan de la concertation souligne qu'il convient d'annoncer les intentions à long terme du Gouvernement s'agissant de la planification de futurs projets éoliens en Manche ;
- la Programmation pluriannuelle de l'énergie, lors de sa prochaine révision, devra comporter des objectifs de développement de l'éolien en mer par façade maritime, conformes avec les objectifs qui seront fixés dans la loi de programmation énergie climat pour atteindre la neutralité carbone ;
- le développement de l'éolien en mer a vocation à se poursuivre sur chacune des façades maritimes métropolitaines, conformément aux orientations des documents stratégiques de façade et notamment lors de débats public de façade, y compris pour celles accueillant déjà des parcs éoliens en mer en construction ; ce développement s'effectue en cohérence avec les objectifs de développement des énergies renouvelables et de protection de la biodiversité de la loi pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysage de 2016 ;
Considérant, sur l'opportunité du projet, que :
- le projet est situé dans la zone " Centre-Manche ", une zone de moindre impact identifiée lors d'un précédent débat public dans la perspective de l'installation du parc éolien " Centre Manche 1 " ;
- la nécessité de lutte contre le dérèglement climatique a été largement partagée par les participants à la concertation préalable ; le projet de parc éolien en mer posé pouvant aller jusqu'à environ 1,5 GW répond au double objectif de réduction des émissions de gaz à effet de serre et de diversification du mix électrique et énergétique français pour le rendre plus résilient, participant ainsi à la transition énergétique française et à l'atteinte des objectifs de neutralité carbone ;
- un certain nombre de participants à la concertation ont fait part de leur intérêt pour ce nouveau projet en considération des opportunités de développement pour l'économie régionale engendrées par ce dernier ;
- le projet contribuera à la consolidation, en France et au niveau régional, de la filière industrielle de l'éolien en mer, qui a commencé à se développer, notamment en Normandie ;
Considérant, sur la zone de projet, que :
- la concertation préalable a permis de recueillir l'expression du public sur l'augmentation de la capacité de la zone " Centre-Manche " avec un nouveau projet éolien pouvant aller jusqu'à environ 1,5 GW ;
- la zone " Centre-Manche " avait été définie en évitant, notamment par son éloignement, les zones les plus sensibles du point de vue des enjeux environnementaux, les zones où l'activité de pêche était la plus importante, les voies de trafic maritime, la zone de sensibilité paysagère forte des tours Vauban (recommandation de l'étude de prise en compte des tours), les zones militaires ;
- les enjeux mis en avant par le public lors de la concertation sont ceux qui avaient été pris en compte pour la définition de la zone " Centre-Manche " à l'issue du débat public en 2019-2020, au sein de laquelle sera implantée le second projet ;
- aucun élément avancé durant la concertation n'est venu remettre en cause les arguments ayant conduit à définir la zone préférentielle pour l'implantation d'un second projet en zone " Centre-Manche " ;
- l'importance d'un éloignement minimum de 40 km des tours Vauban a été réaffirmé au cours de la concertation, confirmant le caractère non préférentiel de la partie sud-ouest de la zone, identifiée dans le dossier des maîtres d'ouvrage comme revêtant un fort enjeu patrimonial et d'accès à la concession de granulats ;
- les échanges vis-à-vis des enjeux de trafic maritime dans la partie Est de la zone préférentielle doivent se poursuivre avec les parties prenantes pour confirmer la possibilité d'implanter des éoliennes dans l'intégralité de cette zone ;
Considérant, sur le raccordement, que :
- le choix d'un raccordement en courant continu de 1 250 MW pour le premier projet éolien en " Centre Manche " permet d'évacuer entre 200 MW et 250 MW d'un deuxième projet éolien, en fonction de la puissance du premier parc, permettant une mutualisation partielle et une optimisation des raccordements électriques ;
- le document des " Perspectives de développement des réseaux électriques en mer sur la façade normande " mis à jour en janvier 2022, propose, pour un développement de projets éoliens en " Centre Manche " pour une capacité totale pouvant aller jusqu'à 2,5 GW, deux raccordements en courant continu de 1 250 MW en technologie 320 kV, dont l'un vers le Cotentin et l'autre vers le Calvados (préférentiel) ou la Seine-Maritime ;
- la concertation préalable n'a pas permis de dégager un consensus sur la zone préférentielle de raccordement ;
- les études menées en phase de concertation préalable ont permis de confirmer les avantages techniques et économiques d'un raccordement vers le Calvados, y compris au regard des enjeux de long terme ;
Considérant, sur le cahier des charges de la procédure de mise en concurrence, que :
- le public a exprimé de fortes attentes en matière de prise en compte du patrimoine, comme pour le premier projet éolien en Centre-Manche ;
- un certain nombre de participants ont manifesté une volonté d'adaptation du cahier des charges pour permettre et valoriser l'innovation au sein du parc éolien en mer ;
Considérant, sur la biodiversité, que :
- le réchauffement climatique est l'une des causes majeures de disparition de la biodiversité et qu'il est urgent d'agir pour limiter au plus vite les émissions de gaz à effet de serre en décarbonant notre mix énergétique ;
- la mise en œuvre de la démarche d'évitement, de réduction et de compensation des impacts se poursuivra lors des phases ultérieures des projets jusqu'à la délivrance des autorisations, pour le parc et le raccordement ;
- le Comité Interministériel de la Mer (CIMER) 2019 a décidé d'installer un suivi scientifique des parcs éoliens à l'échelle de la façade maritime Manche Est-mer du Nord, au travers d'un comité de gestion et de suivi de façade et d'un conseil scientifique de façade, qui participera à améliorer la connaissance des enjeux à l'échelle de la façade et celle des impacts potentiels de l'activité éolienne, au regard notamment des effets cumulés ;
- le Gouvernement a mis en place en 2022 un Observatoire national de l'éolien en mer, afin de mieux valoriser les connaissances existantes sur l'éolien en mer, y compris le retour d'expérience des parcs déjà existants à l'étranger, et de mener dès à présent de nouvelles études à grande échelle afin d'améliorer la connaissance de l'environnement marin et de garantir la bonne prise en compte des enjeux de biodiversité ;
- le groupe de travail sur les impacts cumulés des parcs éoliens en mer (GT ECUME) a lancé en 2022, trois grandes études sur l'arc atlantique Nord-Est comprenant la Manche et portant sur la collision cumulée générée par les 7 parcs autorisés sur les oiseaux marins, leur effet cumulé sur la dynamique des populations, et leur effet cumulé sur le déplacement en mer des oiseaux ; les résultats de ces études seront rendus publics et contribueront à l'appréciation des risques cumulés de ce parc éolien sur l'avifaune marine ;
- le GT ECUME, mis en place en 2017, a publié un premier cahier de recommandations à l'été 2021 et travaille à la publication d'un second cahier de recommandations qui sera rendu public ;
Considérant, sur la pêche maritime professionnelle, que :
- des préoccupations ont été exprimées pendant la concertation préalable par les pêcheurs sur l'impact du parc sur leur activité, dans un contexte d'incertitudes quant aux conséquences du Brexit pour la filière de la pêche ;
- en ce qui concerne les parcs éoliens en mer en cours de développement dans la région Normandie (Fécamp, Courseulles-sur-Mer, Dieppe-Le Tréport), des modalités de cohabitation des usages avec la pêche sont définies et seront mises en œuvre lorsque ces parcs éoliens en mer seront mis en service ;
- la zone " Centre-Manche " évite les zones de pêche les plus pratiquées ; que la conception des parcs devra permettre l'exercice de cette activité et réduire ainsi les effets éventuels sur la pêche ;
- les garants recommandent à l'Etat la mise en place d'une structure de concertation spécifique avec le monde de la pêche ;
- des instances associant les différents acteurs économiques agissant sur le plan d'eau, dont les représentants du monde de la pêche et des producteurs d'énergie, et les services de l'Etat, existent ;
Considérant, sur la poursuite de la concertation et de l'information, que :
- le public a manifesté pendant la concertation la volonté de démarches de concertation coordonnées sur le développement des deux projets éoliens en zone " Centre-Manche " ;
- les garants ont pointé le risque de confusion entre les deux projets éoliens en zone " Centre-Manche " ;
- les garants ont recommandé la création d'un comité de suivi associant les élus, les associations et les citoyens, notamment sur les problématiques environnementales, de patrimoine et de paysages ;
- le Conseil Maritime de la façade Manche Est-mer du Nord associe les usagers de la mer et du littoral et les associations de protection de l'environnement aux travaux de planification de l'éolien en mer conduits dans le cadre du document stratégique de façade,
Décide :


  • Une procédure de mise en concurrence sera lancée en 2022 en vue de l'attribution du deuxième parc éolien en mer situé en zone « Centre-Manche » d'une puissance pouvant aller jusqu'à environ 1,5 gigawatts.


  • La zone qui sera inscrite au document de consultation de la procédure de mise en concurrence est la zone d'une surface de 270 km2, dite Centre-Manche 2, identifiée en annexe à la présente décision et située en zone économique exclusive.
    La zone, au sud de la concession de granulat, identifiée en annexe, sera exclue lors de la procédure de mise en concurrence, dans le cas où l'examen des enjeux de trafic maritime, des restrictions réglementaires et le résultat des études techniques et environnementales permettent d'assurer l'implantation complète du projet uniquement au sein de la zone « préférentielle » de 250 km2.


  • Le raccordement, d'une puissance de 1 250 MW, sera réalisé en courant continu. Les démarches de concertation prévues par la circulaire du 9 septembre 2002 relative au développement des réseaux publics de transport et de distribution de l'électricité seront entamées par RTE sur la zone du Calvados identifiée en annexe 2.


  • Le cahier des charges de la procédure de mise en concurrence comportera au moins les mêmes exigences que celles prévues par le cahier des charges du premier projet éolien en Centre Manche en matière d'environnement, de patrimoine, de cohabitation avec les usages existants et de développement du territoire, en tenant compte de l'évolution des connaissances.
    Il prévoira l'obligation pour le lauréat de respecter les engagements en matière d'environnement pris au titre de son offre et les objectifs environnementaux du document stratégique de façade ainsi que de mener les démarches nécessaires à l'obtention des autorisations requises pour la réalisation du projet. Ces autorisations prévoiront les mesures pour éviter, réduire ou compenser les éventuels impacts du projet sur la biodiversité.
    Le cahier des charges prévoira notamment l'obligation pour le lauréat d'étudier les conditions de cohabitation avec la pêche au sein du parc éolien, pendant la phase d'exploitation, dans les limites permises par les exigences de sécurité de la navigation maritime et de sécurité des biens et personnes. Le lauréat reprendra à son compte les engagements pris par l'Etat après la concertation préalable et lors de la concertation continue.
    De plus, l'Etat et RTE étudieront l'opportunité d'intégrer au cahier des charges des dispositions permettant de favoriser l'innovation au sein du projet.


  • Conjointement aux procédures de participation du public et de mise en concurrence, les études environnementales seront poursuivies sur la zone mentionnée à l'article 2, dans le respect des obligations de l'article R. 122-5 du code de l'environnement. Les résultats de ces études, concertées avec les acteurs de la façade, au sein des instances de concertation existantes, seront mis à disposition du public. Ces études seront prises en compte par le lauréat de la procédure de mise en concurrence pour la conception de son projet.


  • Le suivi scientifique du projet éolien en mer qui fera l'objet de la procédure de mise en concurrence mentionnée à l'article 1er sera assuré par le conseil scientifique de façade.


  • Le dialogue avec tous les acteurs intéressés par le projet, dont ceux de la pêche professionnelle, sera poursuivi dans les différentes instances existantes, en particulier au sein du Conseil maritime de façade Manche-Est - Mer du Nord, notamment aux sujets des études environnementales et de la cohabitation des usages.


  • Une information régulière sera fournie au public concernant les travaux menés pour la bonne prise en compte des enjeux environnementaux, patrimoniaux et paysagers, notamment les tours Vauban de Saint-Vaast-la-Hougue.


  • La démarche de concertation de l'Etat et RTE avec les différentes parties prenantes sera poursuivie. Conformément à l'article L. 121-14 du code de l'environnement, cette phase de concertation post-concertation préalable sera organisée par l'Etat et RTE sous l'égide de garants désignés par la Commission nationale du débat public, qui veilleront à la qualité de l'information et de la participation du public pendant les phases de développement du projet à venir.
    L'Etat et RTE veilleront à mener cette nouvelle phase de concertation de façon coordonnée avec la concertation post-débat public en cours sur le premier parc en zone « Centre-Manche » et en lien avec le lauréat de ce premier projet qui devrait être désigné en 2023.


  • Une information régulière sur l'avancement du deuxième parc éolien en situé en zone « Centre-Manche » et son raccordement sera fournie sur le site internet d'information sur les projets éoliens en mer du ministère de la transition énergétique (www.eoliennesenmer.fr).


  • Une instance de concertation et de suivi, éventuellement mutualisée avec celle du premier projet en Centre-Manche, sera installée lors de l'attribution du projet, associant notamment les élus, les associations, les professionnels et le grand public.


  • Conformément à l'article L. 121-8-1 du code de l'environnement, le ministre chargé de l'énergie pourra saisir la Commission nationale du débat public afin de consulter le public sur les parcs éoliens en mer qui seront développés sur la façade Manche-Est Mer du Nord postérieurement à celui cité à l'article 1er, conformément aux objectifs qui seront fixés dans la prochaine Programmation pluriannuelle de l'énergie.


  • La présente décision sera publiée au Journal officiel de la République française.



    • ANNEXESANNEXE N° 1
      ZONE RETENUE EN VUE DU LANCEMENT DE L'APPEL D'OFFRES RELATIF AU PROJET ÉOLIEN EN MER CENTRE MANCHE 2



      Vous pouvez consulter l'intégralité du texte avec ses images à partir de l'extrait du Journal officiel électronique authentifié accessible en bas de page


    • ANNEXE N° 2
      ZONE RETENUE POUR LE LANCEMENT DE LA CONCERTATION RELATIVE AU SECOND RACCORDEMENT ÉLECTRIQUE DE LA ZONE CENTRE MANCHE 2



      Vous pouvez consulter l'intégralité du texte avec ses images à partir de l'extrait du Journal officiel électronique authentifié accessible en bas de page


Fait le 9 août 2022.


Agnès Pannier-Runacher

Extrait du Journal officiel électronique authentifié PDF - 2,1 Mo
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