Loi n° 90-614 du 12 juillet 1990 relative à la participation des organismes financiers à la lutte contre le blanchiment des capitaux provenant du trafic des stupéfiants

Dernière mise à jour des données de ce texte : 07 mai 2005

NOR : ECOX9000077L

Version en vigueur au 01 mars 1994
  • Les dispositions des chapitres Ier et II de la présente loi sont applicables :

    1° Aux organismes régis par les dispositions de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 relative à l'activité et au contrôle des établissements de crédit ;

    2° Aux institutions et services mentionnés à l'article 8 de ladite loi ;

    3° Aux entreprises mentionnées à l'article L. 310-1 du code des assurances ;

    4° Aux organismes entrant dans le champ de l'article L. 111-1 du code de la mutualité ;

    5° Aux sociétés de bourse régies par l'article 1er de la loi n° 88-70 du 22 janvier 1988 sur les bourses de valeur ;

    6° Aux commerçants changeurs manuels.

    Pour l'application de la présente loi, ces organismes, entreprises, institutions, sociétés, services et personnes sont désignés sous le nom d'organismes financiers.

  • Les personnes autres que celles mentionnées à l'article 1er qui, dans l'exercice de leur profession, réalisent, contrôlent ou conseillent des opérations entraînant des mouvements de capitaux, sont tenues de déclarer au procureur de la République les opérations dont elles ont connaissance et qui portent sur des sommes qu'elles savent provenir de l'une des infractions visées à l'article 3.

    Lorsqu'elles ont fait de bonne foi une telle déclaration, ces personnes bénéficient des dispositions de l'article 8 de la présente loi. Elles sont tenues de respecter les obligations définies à l'article 10. Le procureur de la République informe le service visé à l'article 5 qui lui fournit tous renseignements utiles.

    • Les organismes financiers doivent, avant d'ouvrir un compte, s'assurer de l'identité de leur cocontractant par la présentation de tout document écrit probant. Ils s'assurent dans les mêmes conditions de l'identité de leur client occasionnel qui leur demande de faire des opérations dont la nature et le montant sont fixés par le décret prévu à l'article 24.

      Ils se renseignent sur l'identité véritable des personnes au bénéfice desquelles un compte est ouvert ou une opération réalisée lorsqu'il leur apparaît que les personnes qui demandent l'ouverture du compte ou la réalisation de l'opération pourraient ne pas agir pour leur propre compte.

    • Les dispositions de l'article 12 s'appliquent aux bons et titres visés à l'article 990 A du code général des impôts.

      Le régime fiscal de ces bons et titres est maintenu.

      Les dispositions du deuxième alinéa de l'article 537 du code général des impôts ne font pas obstacle à l'application de l'article 12. Toutefois les informations visées à cet article sont portées sur un registre distinct du registre institué par l'article 537 du code général des impôts. Dès lors que le client n'a pas autorisé l'organisme financier à communiquer son identité et son domicile fiscal à l'administration fiscale, le droit de communication prévu aux articles L. 83, L. 85, L. 87 et L. 89 du livre des procédures fiscales ne s'applique ni au registre ainsi institué par le présent article ni aux documents justificatifs mentionnés au premier alinéa de l'article 12 établis à raison des transactions sur les bons, titres et valeurs visés à l'article 990 A et au deuxième alinéa de l'article 537 du code général des impôts.

      Dans l'article 990 A du code général des impôts les mots :

      "lorsque leur détenteur ne communique pas à l'établissement qui assure le paiement des intérêts son identité et son domicile fiscal" sont remplacés par les mots : "lorsque le détenteur n'autorise pas l'établissement qui assure le paiement des intérêts à communiquer son identité et son domicile fiscal à l'administration fiscale".

      Dans le 4° et le 6° du paragraphe III bis de l'article 125 A du code général des impôts, les mots : "lorsque le bénéficiaire des intérêts communique aux établissements payeurs au moment du paiement son identité et son domicile fiscal" sont remplacés par les mots :

      "lorsque le bénéficiaire des intérêts autorise l'établissement payeur, au moment du paiement, à communiquer son identité et son domicile fiscal à l'administration fiscale".

    • Toute opération importante portant sur des sommes dont le montant unitaire ou total est supérieur à une somme fixée par le décret prévu à l'article 24 et qui, sans entrer dans le champ d'application de l'article 3, se présente dans des conditions inhabituelles de complexité et ne paraît pas avoir de justification économique ou d'objet licite, doit faire l'objet de la part de l'organisme financier d'un examen particulier. En ce cas, l'organisme financier se renseigne auprès du client sur l'origine et la destination de ces sommes ainsi que sur l'objet de la transaction et l'identité de la personne qui en bénéficie.

      Les caractéristiques de l'opération sont consignées par écrit et conservées par l'organisme financier dans les conditions prévues à l'article 15. Le service institué à l'article 5 et l'autorité de contrôle peuvent seuls obtenir communication de ce document et des pièces qui s'y rattachent.

      L'organisme financier doit s'assurer que les obligations définies par l'alinéa précédent sont appliquées par ses succursales ou sociétés filiales dont le siège est à l'étranger, à moins que la législation locale y fasse obstacle, auquel cas il en informe le service institué à l'article 5.

    • Sans préjudice des dispositions édictant des obligations plus contraignantes, les organismes financiers conservent pendant cinq ans à compter de la clôture de leurs comptes ou de la cessation de leurs relations avec eux les documents relatifs à l'identité de leurs clients habituels ou occasionnels. Ils conservent également les documents relatifs aux opérations faites par ceux-ci pendant cinq ans à compter de leur exécution.

      Pour l'application de la présente loi, le service institué à l'article 5 et l'autorité de contrôle peuvent demander que ces pièces leur soient communiquées, dans le but de reconstituer l'ensemble des transactions faites par une personne physique ou morale et liées à une opération ayant fait l'objet d'une déclaration visée à l'article 3 ou de l'examen particulier prévu à l'article 14.

    • Sans préjudice de l'application de l'article 40 du code de procédure pénale, les informations recueillies par le service institué à l'article 5 et les autorités de contrôle en application des articles 3, 13, 14 et 15 ne peuvent être utilisées à d'autres fins que celles prévues par la présente loi.

      Leur divulgation est interdite, sous les peines fixées par l'article 226-13 du code pénal. Sous réserve que ces informations soient en relation avec les faits visés à l'article 3, le service institué à l'article 5 est toutefois autorisé à communiquer les informations recueillies à des officiers de police judiciaire désignés par le ministre de l'intérieur dans des conditions fixées par le décret prévu à l'article 24, ainsi qu'aux autorités de contrôle. Il peut également communiquer ces informations au service des douanes. Il peut recevoir des officiers de police judiciaire et des autorités de contrôle les informations nécessaires à l'accomplissement de sa mission.

    • Dans le respect des dispositions législatives et des conventions internationales applicables en matière de protection de la vie privée et de communication des données à caractère nominatif, le service peut communiquer, aux autorités des autres Etats exerçant des compétences analogues, les informations qu'il détient sur des opérations qui paraissent avoir pour objet le placement, la dissimulation, la conversion ou le transfert de sommes provenant de l'une des infractions prévues aux articles 222-34 à 222-39 du code pénal ou à l'article 415 du code des douanes, sous réserve de réciprocité et à condition que les autorités étrangères compétentes soient soumises aux mêmes obligations de secret professionnel que le service institué à l'article 5 de la présente loi.

      Cette communication ne peut être accordée si une procédure pénale a déjà été engagée en France sur la base des mêmes faits ou si cette communication porte atteinte à la souveraineté, à la sécurité, aux intérêts essentiels de la France ou à l'ordre public.

    • I. - Au 1 de l'article 98 de la loi de finances pour 1990 (n° 89-935 du 29 décembre 1989), les mots "Sans préjudice des dispositions de la loi n° 66-1008 du 28 décembre 1966 relative aux relations financières avec l'étranger" sont supprimés.

      II. - La méconnaissance des obligations énoncées au 1 de l'article 98 de la loi de finances pour 1990 (n° 89-935 du 29 décembre 1989) sera punie de la confiscation du corps du délit ou, lorsque la saisie n'aura pu être faite, d'une somme en tenant lieu et d'une amende égale, au minimum, au quart et, au maximum, au montant de la somme sur laquelle a porté l'infraction ou la tentative d'infraction. Cette disposition ne s'applique pas aux relations financières entre le territoire douanier français, d'une part, les territoires d'outre-mer et les collectivités territoriales de Mayotte et Saint-Pierre-et-Miquelon, d'autre part.

      Les dispositions du titre XII du code des douanes sont applicables aux infractions aux obligations visées au présent article.

      Dans le cas où la sanction prévue au premier alinéa du présent article est appliquée, la majoration du 6 de l'article 98 précité n'est pas mise en oeuvre.

      III. - Toute infraction aux dispositions de l'article 107 de la loi de finances pour 1990 (n° 89-935 du 29 décembre 1989) précitée sera punie d'une amende de 100 000 F.

    • Un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application de la présente loi, sans préjudice des règlements professionnels ou administratifs prévus par les législations applicables aux organismes financiers mentionnés à l'article 1er.

      Pour l'application de la présente loi :

      - la commission bancaire exerce le contrôle et le pouvoir disciplinaire sur les agents des marchés interbancaires visés à l'article 69 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée. Elle peut prononcer les sanctions prévues à l'article 45 de la même loi ; - l'inspection générale des finances exerce le contrôle sur la Caisse des dépôts et consignations et les services financiers de La Poste. Le résultat des investigations de l'inspection générale des finances est porté à la connaissance, selon le cas, de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations ou de la commission supérieure prévue à l'article 35 de la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 relative à l'organisation du service public de La Poste et des télécommunications.

    • Les personnes physiques ou morales, inscrites au registre du commerce et des sociétés, autres que les établissements de crédit et les maisons de titres, qui font profession habituelle d'effectuer des opérations de change manuel adressent, avant de commencer leurs opérations, une déclaration d'activité à la Banque de France. Elles tiennent un registre des transactions.

      L'exercice de la profession de changeur manuel est interdit à toute personne qui n'a pas souscrit la déclaration visée ci-dessus ou qui a fait l'objet de l'une des condamnations ou mesures visées à l'article 13 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée.

      Pour l'application de la présente loi :

      - le comité de la réglementation bancaire peut, par voie de règlement, soumettre les changeurs manuels à des règles particulières ;

      - la commission bancaire exerce le contrôle, notamment sur place, des changeurs manuels en liaison avec la direction générale des douanes et des droits indirects.

      Si un changeur manuel a enfreint une disposition de la présente loi ou des textes réglementaires pris pour son application, la commission bancaire peut prononcer l'une des sanctions disciplinaires suivantes :

      - l'avertissement ;

      - le blâme ;

      - l'interdiction d'exercer la profession de changeur manuel.

      En outre, la commission bancaire peut prononcer soit à la place, soit en sus de ces sanctions, une sanction pécuniaire au plus égale à 250 000 F.

      Les sommes correspondantes sont recouvrées par le Trésor public et versées au budget de l'Etat.

      Seront punies des peines prévues à l'article 77 de la loi n° 84-46 du 24 janvier 1984 précitée, les personnes qui effectuent, à titre habituel, des opérations de change manuel en infraction avec les prescriptions de la présente loi.

    • Est applicable dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon la disposition suivante :

      Seront punis d'un emprisonnement de deux à dix ans, de la confiscation des sommes en infraction, ou d'une somme en tenant lieu lorsque la saisie n'a pas pu être prononcée, et d'une amende comprise entre une et cinq fois la somme sur laquelle a porté l'infraction ou la tentative d'infraction ceux qui auront, par exportation, importation, transfert ou compensation, procédé ou tenté de procéder à une opération financière entre la France et l'étranger portant sur des fonds qu'ils savaient provenir directement ou indirectement d'une infraction à la législation sur les substances ou plantes vénéneuses classées comme stupéfiants.

      En cas de mise en examen de ce chef, les dispositions de l'article 19 de la présente loi s'appliquent ; toutefois, les règles de procédure civile auxquelles se réfère cet article sont celles applicables dans chacun des territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte.

      Les références faites dans la présente loi à l'article 415 du code des douanes sont remplacées, pour les territoires d'outre-mer et la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon, par une référence au premier alinéa du présent article.

    • La présente loi est applicable dans les territoires d'outre-mer et dans la collectivité territoriale de Mayotte à l'exception des quatrième et cinquième alinéas de l'article 13.

      Ne sont pas applicables dans la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon les quatrième et cinquième alinéas de l'article 13.

      Les références figurant dans l'article 13 de la présente loi aux articles du code général des impôts sont remplacées, pour les territoires d'outre-mer et les collectivités territoriales de Mayotte et de Saint-Pierre-et-Miquelon, par une référence aux dispositions ayant le même objet prises par l'assemblée territoriale ou le conseil général.

Par le Président de la République :

FRANçOIS MITTERRAND.

Le Premier ministre,

MICHEL ROCARD.

Le ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget,

PIERRE BÉRÉGOVOY.

Le ministre d'Etat, ministre des affaires étrangères,

ROLAND DUMAS.

Le garde des sceaux, ministre de la justice,

PIERRE ARPAILLANGE.

Le ministre de la défense,

JEAN-PIERRE CHEVÈNEMENT.

Le ministre de l'intérieur,

PIERRE JOXE.

Le ministre des départements et territoires d'outre-mer, porte-parole du Gouvernement,

LOUIS LE PENSEC.

Le ministre des postes, des télécommunications et de l'espace,

PAUL QUILÈS.

Le ministre de la solidarité, de la santé et de la protection sociale,

CLAUDE ÉVIN.

Le ministre délégué auprès du ministre d'Etat, ministre de l'économie, des finances et du budget, chargé du budget,

MICHEL CHARASSE.

Travaux préparatoires : loi n° 90-614.

Assemblée nationale :

Projet de loi n° 1338 ;

Rapport de M. François Colcombet, au nom de la commission des lois, n° 1401 ;

Discussion et adoption, après déclaration d'urgence, le 7 juin 1990.

Sénat :

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, n° 369 (1989-1990) ;

Rapport de M. Jacques Thyraud, au nom de la commission des lois, n° 388 (1989-1990) ;

Discussion et adoption le 21 juin 1990.

Assemblée nationale :

Projet de loi, modifié par le Sénat, n° 1502 ;

Rapport de M. François Massot, au nom de la commission mixte paritaire, n° 1510 ;

Discussion et adoption le 26 juin 1990.

Sénat :

Projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, au nom de la commission mixte paritaire, n° 424 (1989-1990) ;

Discussion et adoption le 29 juin 1990.

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